J. Cherhal / Sans titre

Le plus surprenant dans le CD de 2001 comme dans l'album Jeanne Cherhal de 2002 n'est pas tant la fureur adolescente qui émane de l'ensemble mais la coexistence de ces chansons abruptes (ex.Ce soir, Les berceaux brodés) avec deux ou trois autres qui sont déjà tout à fait dans les demi-teintes de la maturité cherhalienne. Sans titre est l'exemple le plus frappant de ces quelques exceptions. Première chanson d'une longue série consacrée aux violences faites aux femmes (ex.On dirait que c'est normal, Noxolo), elle se garde bien de préciser son sujet, préférant le suggérer par ce qui ressemblerait à un collage aléatoire de considérations anodines ("Tiens l'hiver qui surprend oh y a plus de saison") et de bribes de pensées ou de conseils ("Finis ton rêve et puis au lit") s'il n'était soumis à une métrique rigoureuse (cinq quatrains en alexandrins, le dernier reprenant le premier). Cherhal n'impose donc rien ici, pas même le titre : est-ce parce que ce qu'elle nous laisse deviner est innommable, au sens propre de ce qui est trop effroyable pour être nommé ?